Comment écouter un autre membre du collectif qui me partage son chacal ?

Comme on le disait dans l’article précédent, on a tou-te-s besoin, à un moment ou à un autre, de faire sortir nos chacals. Certains le font chez le psy, d’autres avec leur conjoint, d’autres encore dans leur journal intime. Et certain-e-s le font auprès de vous.

Certaines personnes attirent naturellement les personnes qui ont envie/besoin de se plaindre d’un membre du collectif.

Que ce soit par leur capacité naturelle à écouter, leur sérénité, ou bien leur capacité à se plaindre eux-mêmes des autres.

Bref, vous êtes peut-être quelqu’un qui attire les personnes qui ont besoin de faire sortir leurs chacals.

Et encore une fois, répétons-le, c’est normal d’avoir besoin de les faire sortir de temps en temps !

Sauf que quand on vit en collectif, on vous invite à le vivre avec le plus de discernement possible, car ces chacals ont un impact beaucoup plus large que vis-à-vis de collègues de bureaux, ou de voisins.

Dans les écolieux, les habitats participatifs, les oasis, les membres ont souvent beaucoup mis en commun, je les vois presque comme une communauté de destins, on achète ensemble, on prend des décisions ensemble, on partage des espaces ensemble, et des moments de fêtes, et les accidents de la vie. Bref, c’est un collectif précieux, alors ces chacals ont besoin d’être un peu canalisés.

Alors moi qui entend les jugements de quelqu’un d’autre dans le collectif, j’ai ma responsabilité dans ma manière de l’écouter. Alors comment vivre au mieux cette responsabilité ?

 

 

1/ L’écoute empathique et ses limites

La première étape est bien sûr d’écouter l’autre avec empathie.

C’est-à-dire reformuler ce que l’autre dit, me sentir en communion avec ce qu’il/elle ressent, je mets mon cœur à vibrer à l’unisson de celui de la personne que j’écoute, je prends son parti, je mets ses lunettes pour voir son monde.

Je pense que cette écoute empathique est nécessaire. La personne qui juge est souvent une personne blessée qui s’ignore ou pas. Elle a besoin d’empathie, besoin de reconnaissance de ses difficultés, de ses blessures.

La personne qui vient vous parler a sûrement besoin d’être pleinement accueillie et validée : oui, tu as le droit de ressentir ce que tu ressens.

Sauf que si je me limite à cette écoute empathique, je le/la conforte dans ses jugements sur l’autre.

Je peux parfois même me sentir un peu mal après une conversation comme celle-là. Un peu comme si j’avais été un déversoir à jugement, l’autre s’en est libéré en me les partageant, il/elle se sent plus léger, mais moi je me retrouve avec un gros paquet.

J’ai été dans l’amour et la compassion vis à vis de la personne qui me parlait, mais l’autre, celle qui fait aussi partie de notre collectif, je n’ai pas exprimé mon amour pour cette personne, j’ai confirmé l’autre dans sa position, écouté dans ses difficultés, et renforcé dans ses jugements.

Source : unsplash.com
 

2/ L’encouragement fraternel

Dans un collectif, on doit tenir en même temps l’amour et la vérité. A la fois j’accueille l’autre tel qu’il/elle est, je ne souhaite pas le changer. Et en même temps, je crois en la meilleure version de lui/elle, et je l’encourage à donner le meilleure de lui/elle même.

Donc je l’écoute avec ses chacals, je l’accepte avec ses chacals, entièrement, et en même temps, je peux lui rappeler qu’il-elle peut trouver des solutions et se mettre en mouvement pour ne pas rester bloqué dans ses jugements.

Une fois que l’autre s’est senti écouté/reconnu/accepté, ma responsabilité en tant que membre du collectif est d’encourager l’autre à ne pas rester dans cette situation, à remettre de la vie là dedans.

Mon rôle n’est pas de prendre position, d’exprimer mon point de vue sur la situation, de dire qui a raison, qui a tort.

Ni même de dire à l’autre ce qu’il ou elle doit faire.

Mais de l’encourager à remettre du mouvement dans cette situation, à ne pas rester bloquer sur un jugement, en lui faisant peut-être voir les conséquences pour lui/pour l’autre/pour le groupe de rester bloqué sur des jugements négatifs.

Et là encore, l’idée est surtout de l’accompagner à trouver des manières lui/elle-même pour sortir de cette situation, plus que de lui proposer. Il faut que le mouvement vienne de l’intérieur.

J’ai entendu récemment cette histoire : une coquille d’œuf qui se casse de l’extérieur, c’est un drame. Une coquille d’œuf qui se brise de l’intérieur, c’est un poussin, c’est de la vie !

Source : unsplash.com
C’est pareil avec les gens évidemment. Votre rôle peut être de rappeler l’importance pour le collectif de mettre de la vie dans cette situation, mais c’est à l’autre de choisir et de trouver comment faire (même si comment faire, cela peut être de demander des idées !).

Voilà, j’espère que cela vous aura nourri.

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Encore plus de conseils pour celles et ceux qui vivent ou souhaitent vivre oasis dans le livre Vivre ensemble en écolieu écrit par Daphné Vialan, accompagnatrice à la Coopérative Oasis sur le volet humain.

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Daphné Vialan

Daphné Vialan

Daphné Vialan est passionnée par la vie en collectif et le vivre-ensemble. Elle a habité plusieurs années à l’Arche de Saint-Antoine, et habite maintenant au sein d’un collectif en formation au Nord d’Agen.

Elle accompagne des collectifs à prendre soin de leurs relations au sein de la Coopérative Oasis.

Son expérience personnelle, alliée à ses multiples formations (CNV, gouvernance partagée, dynamique de groupe, transformation constructive des conflits, Processwork et Clean Coaching) font de son travail une combinaison unique qui réunit le cœur et la tête.

Ludovic Simon

Ludovic Simon

Citoyen engagé dans la vallée de la Drôme, amoureux des expériences de coopération et de gouvernance partagée, entrepreneur dans sa vie d’avant et auto-constructeur de maison, Ludovic accompagne des projets d’oasis et d’habitat participatif sur les aspects juridiques, financiers et humains.

Après des études en management de l’innovation à Polytech, il a cofondé plusieurs projets coopératifs : une société en gouvernance partagée dans le domaine de l’emploi avec 10 salariés et 2 millions d’utilisateurs inscrits, un tiers lieu de 3000 m² à Nantes (la Cantine), un évènement professionnel qui rassemble plus de 10 000 personnes sur 3 jours…

Il a également accompagner de nombreux porteurs et porteuses de projets, en notamment dans le secteur de l’ESS.

Ramïn Farhangi

CooperativeOasis_Ramin_Village de Pourgues

Ramïn Farhangi est le cofondateur de l’école Dynamique à Paris (2015), réputée pour être une des premières écoles démocratiques en France, où les enfants font ce qu’ils veulent de leurs journées. Il a également cofondé le réseau national de l’éducation démocratique EUDEC France (2016). Il est l’auteur de Pourquoi j’ai créé une école où les enfants font ce qu’ils veulent (Actes Sud, 2018).

En 2017, il fonde l’écovillage de Pourgues, où il facilite des formations sur la vie collective et le leadership puis rejoint l’équipe opérationnelle de la Coopérative Oasis en 2022 comme animateur du réseau des oasis et accompagnant.

Il est également le fondateur de l’association Enfance Libre qui réunit des désobéissants afin de contester la suppression du régime légal de l’Instruction En Famille.

Coralie Darsy

Portrait Coralie Darsy

Après quelques années d’ingénierie dans l’eau et l’environnement, Coralie a été éducatrice Montessori.

En 2021, elle devient bénévole à la Coopérative Oasis pour lancer la Pépinière Oasis, puis rejoint pleinement l’équipe en 2022 pour coordonner les formations.

 

Mathieu Labonne

Ingénieur de l’Isae-SupAéro de formation ayant travaillé au CNRS dans la recherche sur le climat et la gouvernance carbone, Mathieu Labonne a été directeur de l’association Colibris où il a notamment développé le Projet Oasis.

Il est aujourd’hui président et directeur de la Coopérative Oasis, qui réunit des centaines de lieux de vie et d’activités écologiques et collectifs, où l’on expérimente des modes de vie sobres et solidaires au service du vivant.

Il est aussi engagé sur un chemin spirituel au côté de la sainte indienne Amma, dont il coordonne le centre, la Ferme du Plessis, près de Chartres depuis 2011.

Il est également président d’Oasis21, un ensemble de Tiers-Lieux en Île-de-France qu’il a contribué à créer.

Il est à l’origine de l’écohameau du Plessis  dans l’Eure-et-Loir où il réside avec sa famille.