Les oasis, un monde d’hommes ?

Anne-Laure Nicolas a fondé Le bois du barde, une oasis de vie dans le centre Bretagne. Depuis 13 ans, elle y expérimente avec les autres habitants une vie quotidienne collective et sobre où chacune tente de prendre une place équivalente… Anne-Laure est intervenue à ce sujet lors du Festival Oasis 2020 en posant la question de la domination dans les oasis.

 

Les figures de la transition sont essentiellement masculines

Les figures de la transition sont essentiellement masculines. Depuis des années, les voix critiquant le manque de représentativité et de responsabilité des femmes dans tous les milieux se font de plus en plus entendre. Qu’en est-il des milieux alternatifs en général, et écologique en particulier ? Quelle place les femmes prennent-elles réellement ? Pour ce qui est du plaidoyer à l’échelle nationale, les figures de proue de la transition sont, la plupart du temps, des hommes. Cyril Dion, Maxime de Rostolan, Pablo Servigne, Arthur Keller, Nicolas Hulot, Pierre Rabhi, Paul Watson, Marc de la Ménardière… la liste est longue.

Le collectif du Bois du Barde
Le collectif du Bois du Barde

Les oasis ne sont pas épargnées par la domination

Les oasis ont pour ambition d’être des lieux d’expérimentation, de transformation intérieure et sociétale et de soin de tous les vivants. Je crois pouvoir dire que la majorité des fondateurs et habitants de ces écolieux collectifs ont à cœur d’être vigilants sur la place de la femme au quotidien. Beaucoup d’ailleurs pratiquent l’écriture inclusive, le partage équitable des tâches quotidiennes, l’éducation “non genrée”…

Cependant, force est de constater que les vieux réflexes de notre société judéo-chrétienne patriarcale reviennent souvent au galop. Rapports de force, verticalité, compétition, et domination masculine sont souvent aussi monnaie courante dans nos lieux. Nous ne sommes pas exempts de ces mécanismes, conscients ou inconscients. Le travail consiste aussi à les regarder, les analyser, et tenter sans cesse de les contrecarrer.

Scène de vie au Bois du Barde

Rester humble et construire ensemble

De ce que je comprends de l’écoféminisme et d’un certain féminisme, c’est la force du « contre » : « contre le patriarcat », « contre la société de consommation » « contre l’appauvrissement de la planète ». De mon point de vue, prendre sa place en temps que femme n’est pas un combat, c’est une danse. Une danse « pour ».

J’ai grandi à l’ombre de femmes fortes qui ont construit davantage qu’elles ont combattu. Ma mère, cadre supérieure dans une entreprise exclusivement masculine, a géré sa vie professionnelle et de mère de famille d’une main de maître, ne laissant rien au hasard. Ma grand-mère a accueilli nombre de personnes en danger lors de la seconde guerre mondiale. J’ai moi-même tenté d’aborder les épreuves de la vie de façon positive : la rupture d’anévrisme et le handicap du père de mes enfants, un burn-out, la création du Bois du Barde que j’ai tenu des années à bout de bras, avec la volonté de réaliser ces rêves, d’avancer toujours avancer.

Les oasis doivent montrer le chemin d’une société plus juste pour les femmes. Nous devons pour cela ouvrir les yeux sur les mécanismes traditionnels qui sont encore à l’œuvre dans nos propres maisons, rester humbles, et continuer à construire ensemble.


Pour aller plus loin

leboisdubarde.bzh

Le Festival Oasis 2020

Sur le même thème

Retour en haut

Daphné Vialan

Daphné Vialan

Daphné Vialan est passionnée par la vie en collectif et le vivre-ensemble. Elle a habité plusieurs années à l’Arche de Saint-Antoine, et habite maintenant au sein d’un collectif en formation au Nord d’Agen.

Elle accompagne des collectifs à prendre soin de leurs relations au sein de la Coopérative Oasis.

Son expérience personnelle, alliée à ses multiples formations (CNV, gouvernance partagée, dynamique de groupe, transformation constructive des conflits, Processwork et Clean Coaching) font de son travail une combinaison unique qui réunit le cœur et la tête.

Ludovic Simon

Ludovic Simon

Citoyen engagé dans la vallée de la Drôme, amoureux des expériences de coopération et de gouvernance partagée, entrepreneur dans sa vie d’avant et auto-constructeur de maison, Ludovic accompagne des projets d’oasis et d’habitat participatif sur les aspects juridiques, financiers et humains.

Après des études en management de l’innovation à Polytech, il a cofondé plusieurs projets coopératifs : une société en gouvernance partagée dans le domaine de l’emploi avec 10 salariés et 2 millions d’utilisateurs inscrits, un tiers lieu de 3000 m² à Nantes (la Cantine), un évènement professionnel qui rassemble plus de 10 000 personnes sur 3 jours…

Il a également accompagner de nombreux porteurs et porteuses de projets, en notamment dans le secteur de l’ESS.

Ramïn Farhangi

CooperativeOasis_Ramin_Village de Pourgues

Ramïn Farhangi est le cofondateur de l’école Dynamique à Paris (2015), réputée pour être une des premières écoles démocratiques en France, où les enfants font ce qu’ils veulent de leurs journées. Il a également cofondé le réseau national de l’éducation démocratique EUDEC France (2016). Il est l’auteur de Pourquoi j’ai créé une école où les enfants font ce qu’ils veulent (Actes Sud, 2018).

En 2017, il fonde l’écovillage de Pourgues, où il facilite des formations sur la vie collective et le leadership puis rejoint l’équipe opérationnelle de la Coopérative Oasis en 2022 comme animateur du réseau des oasis et accompagnant.

Il est également le fondateur de l’association Enfance Libre qui réunit des désobéissants afin de contester la suppression du régime légal de l’Instruction En Famille.

Coralie Darsy

Portrait Coralie Darsy

Après quelques années d’ingénierie dans l’eau et l’environnement, Coralie a été éducatrice Montessori.

En 2021, elle devient bénévole à la Coopérative Oasis pour lancer la Pépinière Oasis, puis rejoint pleinement l’équipe en 2022 pour coordonner les formations.

 

Frédéric Bosqué

Frédéric Bosqué se définit comme un « entrepreneur humaniste ».

Il a été cofondateur de la monnaie citoyenne le Sol-violette de Toulouse et du Mouvement français pour un revenu de base.

Jusqu’à fin 2013, il a été gérant d‘une coopérative ouvrière et membre du Centre des Jeunes Dirigeants. Depuis, ayant renoncé à toute activité marchande, il vit de contributions citoyennes et se consacre à un projet expérimental : la création d’un écosystème territorial pour le XXIe siècle, TERA, où 85 % de la production vitale à ses habitants seront relocalisés.

Mathieu Labonne

Ingénieur de l’Isae-SupAéro de formation ayant travaillé au CNRS dans la recherche sur le climat et la gouvernance carbone, Mathieu Labonne a été directeur de l’association Colibris où il a notamment développé le Projet Oasis.

Il est aujourd’hui président et directeur de la Coopérative Oasis, qui réunit des centaines de lieux de vie et d’activités écologiques et collectifs, où l’on expérimente des modes de vie sobres et solidaires au service du vivant.

Il est aussi engagé sur un chemin spirituel au côté de la sainte indienne Amma, dont il coordonne le centre, la Ferme du Plessis, près de Chartres depuis 2011.

Il est également président d’Oasis21, un ensemble de Tiers-Lieux en Île-de-France qu’il a contribué à créer.

Il est à l’origine de l’écohameau du Plessis  dans l’Eure-et-Loir où il réside avec sa famille.