Situé dans le Morbihan, à Priziac, le Village du Bel-Air est un lieu de vie collectif fondé en 2018 par une bande d’amis. Ils expérimentent depuis un quotidien intense, où chacun est invité à se réaliser avec le soutien des autres. Si cette gouvernance organique comporte son lot de tensions et de difficultés, elle ouvre également des espaces de liberté et de soin qui attirent des visiteurs venus de toute la France…
Une installation en quelques semaines
En 2018, une bande de copains, rejoints par d’autres depuis, ont décidé de vivre autrement attendre des années avant de passer à l’action. À six d’abord, ils ont réfléchi au projet quelques semaines, ont créé une Société Civile Immobilière (SCI) et acheté un lieu : deux maisons au bord du lac de Priziac, en Centre-Bretagne. Une association s’occupe de toute la vie des habitants sur place et une autre s’occupe des différentes activités qu’ils proposent.
Douze jeunes amis habitent aujourd’hui au Village du Bel-Air. Le terrain d’une quinzaine d’hectares est situé sur les ruines d’un château entouré de douves datant du XVIe siècle. Le lac est accessible par un petit chemin dans la forêt, bordé par la mousse et les myrtilles sauvages…
Vivre ensemble, mais pas tout le temps
La bâtisse principale fait office de maison commune partagée pour les repas, les réunions, les célébrations et les formations. Chaque habitant ou couple dispose en plus d’un habitat léger personnel : yourte, dôme, caravane ou cabane. “Le but n’est pas de se laisser absorber par le collectif, explique Jesse, mais de laisser à chacun la liberté d’être seul s’il le souhaite. Vivre ensemble oui, mais pas tout le temps.”
Après une école de commerce et de premières expériences professionnelles décevantes, Daphné a croisé la route du Bel-Air. “Le Bel-Air m’a offert l’énergie et la matière dont j’avais besoin pour avancer. J’ai rencontré Jesse et Timothée en octobre 2020 ; 6 mois plus tard, je posais mes bagages à l’écovillage. J’ai trouvé un terrain et des compagnons de jeu pour m’incarner de manière plus alignée, un lieu où on s’accueille les uns les autres dans nos élans de liberté. ”
Une participation libre et consciente de tous les jours
S’il y a une chose sur laquelle tous les habitants du Bel-Air s’accordent, c’est que le collectif expérimente. Dans tous les domaines et en particulier dans celui de l’humain : toutes et tous cherchent avant tout à imaginer un système qui respecte autant les besoins du collectif que la souveraineté de chacun.
C’est dans cette optique que le collectif n’exige jamais quelque chose d’un individu. “Il y a une vraie invitation à vivre ce que chacun a envie de vivre, explique Daphné. On essaye d’accueillir ce qui est vrai en nous, en essayant de ne pas reproduire un schéma de contrainte. Il n’est attendu de personne de donner de l’argent, d’entretenir le lieu ou de participer aux activités. Évidemment, cela peut générer des inconforts chez les habitants et nous nous offrons des espaces pour parler de tout ça. Dans notre vision “organique” des choses, notre système peut toujours évoluer, mais jusqu’ici participer de manière libre et consciente au quotidien est ce qui semble nous convenir le mieux ! »
L’exercice n’est pas pour autant facile. Les tensions relationnelles font partie de la vie quotidienne de ce groupe qui vit et travaille presque 24 heures sur 24 dans un même espace. “On essaye de favoriser le bien-être de chacun et du groupe en s’offrant fréquemment des espaces collectifs d’expression et d’écoute mais on est ok avec le fait qu’il y ait des tensions non résolues, des non-dits, parfois même des expressions violentes… reprend Daphné. C’est la vie ! On essaye de rester attentifs à ne pas tomber dans l’injonction à l’harmonie permanente.”
La solidarité économique au service de l’épanouissement de chacun
Le collectif met aujourd’hui en commun ses ressources financières, pour repenser son rapport à l’argent et au travail. Les revenus de l’accueil de groupes et d’événements remplissent en partie les caisses communes, complétés par les différents moyens des habitants, dont les salaires de celles et ceux qui travaillent encore à l’extérieur – employés à la communauté de communes, à la recyclerie, à la fresque du climat…
Cette mise en commun permet à chacun de se réaliser. “Quand le médecin du groupe a annoncé qu’il voulait changer de voie, ça représentait un gros manque à gagner pour le collectif, raconte Daphné. Mais le collectif s’est tout de suite organisé pour trouver de l’argent autrement et le soutenir dans son choix.”
Beaucoup d’activités sont aujourd’hui envisagées : artisanat, restauration, attelage pour de l’écotourisme, cinéma en plein air, festival, fête de la châtaigne, marchés paysans, épicerie solidaire, formations…
Soigner le vivant
Le respect de la nature est une valeur phare du collectif, qui lui permet d’envisager un lieu de vie abondant et résilient, où la place de l’humain dans la nature se rééquilibre. Cette démarche est permise par la conception des espaces de vie en harmonie avec le paysage, avec des outils de permaculture, en utilisant des ressources locales et en favorisant l’auto-construction autant que possible.
“La sobriété heureuse est notre guide de conduite ! explique Jesse. On récupère, on recycle, on emprunte ou on répare avant d’acheter de nouveaux produits. Et l’autosuffisance est un objectif, comme un cap à suivre afin d’assurer la pérennité du projet.” Pour ce faire, le collectif avance sur le chemin de la souveraineté alimentaire (potager, forêt-jardin, etc.) et énergétique (récup’ de panneaux solaires, rénovation de l’habitat, etc.) sans jamais faire de ces valeurs des dogmes enfermants.
L’accompagnement de la Coopérative Oasis
La Coopérative Oasis accompagne celles et ceux qui vivent ou souhaitent vivre dans des écolieux collectifs : les oasis. Depuis mars 2021, la Coopérative Oasis accompagne le village du Bel-Air. Elle lui a fait un apport fiancier de 200 000 euros sur 10 ans, pour financer les premiers travaux de rénovation des deux longères et les premiers habitats individuels sur le site. Elle les soutient en parallèle sur leur structuration juridique et financière.
Pour continuer ce travail de prêt et d’accompagnement d’oasis partout en France dans le besoin, nous cherchons plus d’investisseurs !
Pour aller plus loin
La Voix des Oasis : le village du Bel-Air
Dans ce podcast, Alexandre Sattler donne la parole à Jesse qui se prête volontiers au jeu du micro pour partager sa vision du lieu, les projets en cours et à venir. Seront abordés ici le sensible sujet du facteur humain, le montage juridique et financier, mais surtout la vie, sous un angle résolument positif. Selon Jesse, le collectif est un miroir pour nous faire avancer :
Série web : Le Village du Bel-Air, 1 an au coeur du collectif